Traditionnellement, la littérature comporte trois genres que sont le roman, la poésie et le théâtre. Chacun d'eux se caractérise par des écoles, des mouvements et des courants. La critique littéraire a depuis longtemps exercé ses talents, le fantastique est un courant du XIX è siècle bien défini et circonscrit. Cependant, il prend sa source dès le XVIII è siècle avec le romantisme allemand et le roman gothique anglais. Le fantastique poursuit son chemin au XX è siècle grâce à Lovecraft ou Borges et s'intègre dans l'histoire de l'art contemporain avec des peintres surréalistes comme René Magritte ou Max Ernst. Qu'en est-il pour le Septième Art ?
Le fantastique se définit par des frontières plus nettes en littérature qu'au cinéma. Dans le texte romanesque, il existe une séparation entre l'étrange [dans le récit étrange, l'apparition du surnaturel reste apparent. Comme dans le fantastique, il donne matière à interrogation et provoque la peur. Cependant, loin d'être mystérieux, il trouve une explication rationnelle. L'étrange caractérise souvent le roman policier dans lequel le surnaturel est refusé], le merveilleux [le merveilleux demeure un surnaturel accepté, sans mystère. Il s'agit d'un univers où rien n'est impossible. Ainsi, la science-fiction et le merveilleux siègent sur le même terrain de la critique littéraire], la science-fiction et le fantastique. Ce dernier se caractérise par un déséquilibre du réel qui fait apparaître au sein d'un univers crédible des éléments inexplicables suscitant la peur.
Pour le Septième Art, la distinction est moins claire : on appelle cinéma fantastique un ensemble de genres qui sont très différents les uns des autres. Il y a le film d'horreur, l'héroïc fantasy [il s'agit du merveilleux chevaleresque à la dimension épique et qui opère allègrement le mélange des genres, des époques et des mythes : cf. Excalibur de John Boorman], la science-fiction, le gore [Gore est un terme d'origine anglaise qui désigne le sang versé. Ce type de film cherche à dégoûter le spectateur en montrant des corps mutilés et agonisants : cf. Re-Animator de Stuart Gordon], le film catastrophe et le serial killer : forme de polar dans laquelle il est difficile de savoir si les psychopathes agissent volontairement ou bien s'ils sont programmés par une force maléfique [le tueur en série David Berkowitz, dans Summer of Sam de Spike Lee, est persuadé que les meurtres lui sont dictés par un doberman, incarné en démon].
Cette hésitation du spectateur entre une interprétation rationnelle ou surnaturelle des faits rapproche ce genre de film du fantastique tel qu'il est défini par la littérature. Il s'agit de mettre en relation des contes fantastiques et des films considérés comme tels par le Septième Art. Mais ceux-ci plongent parfois dans le merveilleux, la science-fiction ou l'horreur la plupart du temps. Rares sont les films dans lesquelles le surnaturel est une source d'hésitation: "à l'image des créatures maléfiques qu'il met en scène, le fantastique surgit un peu partout, de façon inattendue. Cette présence multiple et diversifiée dans la production courante et dans les films d'auteur n'en facilite pas la saisie ni la définition" [Pinel (V.), Ecoles, genres et mouvements au cinéma, Paris, 2000, p.102]. Cependant, qu'il s'agisse du fantastique au cinéma ou dans un roman, le frisson dans le discours et le récit demeure minutieusement préparé. Quelles techniques narratologiques permettent de captiver le lecteur ou le spectateur ? Comment se manifeste l'événement dit "surnaturel" ? Que reste-t-il après le passage du fantastique hormis le suspense manipulateur et l'angoisse tant attendue ?